Christine Vespa

Christine Vespa est maître de conférences, habilitée à diriger des recherches. Ses travaux concernent les mathématiques et plus particulièrement la topologie algébrique. Après avoir obtenu une thèse à Paris et effectué un séjour post-doctoral à Lausanne, elle a été recrutée à l’Institut de Recherche Mathématique Avancée. Bien qu’opposée au principe de financement par projet, elle a été membre de plusieurs contrats ANR et a été lauréate d’un des dix prix Espoirs de l’Université de Strasbourg en 2014. Elle est actuellement membre élue du Conseil Documentaire de l’Université de Strasbourg. Page professionnelle

« J’aimerais un vrai changement de politique »

Pourquoi avez-vous rejoint Alternative 2017 ?

J’ai rejoint Alternative 2017 parce que je suis en total accord avec les principes qui animent ce mouvement : la collégialité, la transparence et le recentrage de l’université vers ses missions premières que sont l’enseignement et la recherche. L’Université de Strasbourg souffre depuis plusieurs années de divers maux qui sont masqués par une communication partiale, omniprésente et visant à faire l’éloge d’une université où les baisses de dotations des UFR ont conduit à la détérioration des conditions d’accueil et de formation des étudiants. La répartition des moyens de l’Idex et des Labex est totalement opaque. Les finances sont mal gérées et la démocratie est un leurre. Le jargon administratif et la novlangue, vides de sens, ont aujourd’hui envahi tous les échelons de l’Université de Strasbourg.

L’écart abyssal entre mon ressenti au quotidien et le discours officiel d’autosatisfaction des dirigeants actuels de l’université fait que je n’ai pas confiance en l’équipe sortante et j’aimerais un vrai changement de politique.

Je souhaite une université soucieuse de ses étudiants et de ses personnels, qui doivent être remis au cœur de ses préoccupations.

Vous dites que vous n’avez pas confiance en l’équipe sortante. Pouvez-vous développer ?

Je vais me contenter de donner un exemple parmi tant d’autres. Je ne peux pas avoir confiance en une équipe dont un Vice-Président déclare publiquement lors d’un colloque national (6ème journée open access à Paris) où il présentait le projet d’archives ouvertes à Strasbourg AOC (rebaptisé depuis UnivOAK) que « les dotations que nous mettrons en place pour le quinquennal dépendront de ce qui aura été déposé dans les AOC » par les chercheurs et enseignants-chercheurs et qui évoque « la carotte » et « le bâton » pour les contraindre à le faire. Un tel mépris est extrêmement choquant. La vidéo de cet exposé est disponible en ligne. Le passage auquel je fais référence se situe aux alentours de la 20ème minute.

 

Avec Alternative 2017, que voulez-vous faire à l’université ?

Nous voulons avant tout changer les priorités de l’université. Qu’elle se recentre sur ses missions principales : l’enseignement et la recherche.

Tenter de tout prévoir, contrôler, évaluer, quantifier a un coût, est chronophage, infantilise et fragilise la bonne entente. L’accent doit être remis sur la confiance, le choix, la coopération et la convivialité.

Mais il y a des contraintes budgétaires, non ?

Oui, mais il s’agit de répartir différemment les dépenses. Par exemple, ces dernières années, la communication a pris une place excessive à l’Université de Strasbourg et son budget a fortement augmenté.

Des projets démesurés et inutiles ont absorbé des sommes colossales. A titre d’exemple, le projet de logiciel informatique Alisée, destiné à remplacer Apogée, n’a jamais vu le jour mais a coûté, selon la Cour des comptes, 4,5 millions d’euros, soit l’équivalent du salaire annuel (charges comprises) de 90 chercheurs ou enseignants-chercheurs en début de carrière ! Pour le projet d’archives ouvertes (AOC rebaptisé UnivOAK) les dépenses excèdent 450 000 euros alors que des solutions beaucoup moins onéreuses, telles qu’une interface HAL, existent. Le projet d’ « identités complexes », qui prévoit entre autre une nouvelle typographie de l’Université, est financé à hauteur de 400 000 euros par l’Idex alors que la refonte et l’harmonisation de la typographie ne me semblent pas être prioritaires en ces temps de restrictions budgétaires.

Cet argent mal utilisé aurait dû être employé de manière plus judicieuse. Nous proposons à Alternative 2017 de recentrer les moyens vers le cœur de notre métier : l’enseignement et la recherche. Par exemple, la pertinence scientifique d’une offre de formation est, pour nous, plus importante que sa soutenabilité financière.

Vous semblez opposée à la logique de l’appel à projet. Or, vous en avez bénéficié, non ?

On peut avoir bénéficié d’un système et rester néanmoins conscient de ses effets néfastes. Cette logique exacerbe la compétition au détriment de la collaboration, favorise le clientélisme et n’offre qu’une vision à court terme de la recherche. Les chercheurs passent aujourd’hui beaucoup trop de temps à répondre à ces appels à projet, à les évaluer et à les classer au détriment du temps de recherche effective.

Nous souhaitons alléger les procédures, rendre plus transparents les modes de sélection et mieux organiser les appels à projet au sein de l’université afin de permettre à nos collègues de pouvoir se concentrer sur l’enseignement et la recherche.

L’équipe d’Alternative 2017 est une nouvelle équipe.

Oui, et il s’agit d’une équipe qui n’a pas perdu tout sens de la réalité du métier d’enseignant-chercheur. C’est important pour diriger notre université. Lorsqu’on occupe des fonctions administratives depuis plus de dix ans, on ne sait plus ce que signifient enseigner et faire de la recherche, d’autant plus que ce métier a beaucoup évolué ces dernières années, avec notamment la multiplication des appels d’offre et la complexification de nos missions d’enseignement. Une université ne peut pas être convenablement gérée par des bureaucrates déconnectés de la réalité quotidienne des personnels de l’université.

L’équipe d’Alternative 2017 comprend de nombreux directeurs d’unité et plusieurs membres d’instances locales et nationales qui ont tout à la fois une expérience de l’administration, de l’enseignement et sont des chercheurs très actifs. Je me sens donc beaucoup mieux représentée par ces collègues et j’ai confiance en eux.

Ne pensez-vous pas qu’il est un peu tard pour présenter la candidature d’Alternative 2017 ?

Pas du tout ! Au sein d’Alternative 2017, nous avons souhaité prendre notre temps pour écouter les demandes de nos collègues et établir un vrai programme de manière collégiale. Comme nous assurons activement nos activités d’enseignant et de chercheur, la rédaction de ce programme s’est faite en plus de notre temps de travail ordinaire et notre campagne se déroulera dans les mêmes conditions. Ainsi nous ne pourrons malheureusement pas multiplier les réunions d’information mais nous sommes suffisamment nombreux au sein d’Alternative 2017 pour pouvoir répondre aux interrogations de nos collègues.

En tant qu’enseignante à l’UFR de mathématique et informatique, quelle est votre vision de l’enseignement universitaire ?

Chaque UFR a ses spécificités et nous tenons au sein d’Alternative 2017 à respecter ces particularités qui font la richesse d’une université. Néanmoins toutes les composantes rencontrent les mêmes difficultés : de fortes réductions budgétaires ont été imposées et ont conduit à la suppression de cours et de groupes de travaux dirigés au détriment des étudiants alors que, dans le même temps, beaucoup de composantes ont vu leurs effectifs augmenter. La baisse du nombre de postes statutaires concerne également toutes les composantes. Ces baisses de moyens financiers et humains sont des choix politiques dommageables que je déplore.

Avez-vous un message particulier à adresser aux électeurs ?

Pour remplacer la défiance par la bienveillance et rétablir un climat de confiance à l’Université de Strasbourg : votez Alternative 2017.