L’Université de Strasbourg, première déconcentrée en 1970 et première refusionnée en 2009, a toujours entretenu un rapport particulier avec les réformes nationales de l’ESR. Elle fait partie de la dizaine de Grandes universités de recherche françaises. Membre non seulement de la CPU, mais surtout de la LERU et de la CURIF, elle participe aux réseaux d’influence les plus puissants de l’ESR. Son premier président fut nommé avant même la fin de son mandat à la Direction générale de la recherche et de l’innovation et son Directeur général des services est également président de l’Association des DGS d’établissements d’enseignement supérieur.
A bien des égards, l’Université de Strasbourg est un laboratoire de réformes, et ses dirigeants sont « des producteurs de solutions et de normes reprises par d’autres acteurs du système d’enseignement supérieur français ». Elle est parmi les premières à mettre en application l’autonomie de gestion prévue par la loi LRU de 2007 en passant aux responsabilités et compétences élargies. Elle a obtenu les premiers IDEX confirmés, comme les premières dérogations pour s’endetter. Elle est régulièrement citée en exemple au niveau national, notamment pour sa fondation et sa SATT, ou encore le modèle économique de l’ISIS. Encore aujourd’hui, elle expérimente avant les autres le « dialogue stratégique » qui sera étendu à tous les établissements dans le cadre de la LPPR.
Concernant cette LPPR, plusieurs mesures sont déjà mises en œuvre à l’Université de Strasbourg. Citons notamment les « Chaires professeur junior », ou tenure-tracks, modèle que nous avons décidé de « promouvoir » dès 2017 (Article 3 de la LPPR et Conseil d’administration du 9 mai 2017 de l’Unistra) ; « les primes d’intéressement » (Article 14 de la LPPR et Conseil d’administration du 14 novembre 2017 de l’Unistra, voir aussi notre dossier), et qui permettent au président de notre université de doubler le salaire d’une liste tenue secrète de chercheurs jugés de « très haut niveau » ; ou encore le développement des fondations (Article 16 de la LPPR).
Conformément à ce qui est décrit dans la LPPR, l’Université de Strasbourg s’est déjà dotée de fondations puissantes et de filiales nombreuses, permettant à la fois d’échapper aux règles de la comptabilité publique (colloque « Fusions d’universités : bilan, retours d’expérience et perspectives »), et au contrôle des Conseils centraux de l’université (texte fonctionnement des conseils).
L’Université de Strasbourg et la LPPR se renforcent mutuellement et impulsent un mouvement. Participer aux conseils de l’Université de Strasbourg, approuver en local ces transformations, c’est donc participer de ce mouvement. Or, comme le prouve le récent épisode au CNESER, le fonctionnement démocratique national de l’ESR est totalement inopérant. Et comme le montrent toutes les analyses de la loi ainsi que le bilan de notre université, ce mouvement est contraire aux intérêts de l’enseignement et de la recherche, et de ceux qui les font.
Il est donc désormais de la responsabilité de chaque élu des Conseils de l’Université de Strasbourg de légitimer ou non cette politique, au niveau local comme national.
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