Il n’y a plus d’Alternative

Démission des membres des trois conseils centraux de l’Université de Strasbourg – Conseil d’administration (CA), Commission de la recherche (CR) et Commission de la formation et de la vie universitaire (CFVU) du Conseil académique (CAc) – élus sur les listes « Alternative 2017 » 

Nous sommes sincèrement au regret de présenter notre démission de nos mandats au Conseil d’administration et au Conseil académique de l’Université de Strasbourg. 

Nous sommes confrontés à une absence manifeste de transparence et à un blocage de la part de la Présidence quant à l’utilisation des moyens budgétaires de l’Université de Strasbourg et aux structures qui lui sont liées. 

Les élus dans les conseils sont donc dans l’incapacité d’exercer leurs mandats et il est illusoire de considérer qu’ils décident des orientations politiques de notre université, qui incombent en réalité intégralement à la seule présidence.

Or, la politique de l’Université de Strasbourg est néfaste, y compris selon les propres standards de sa présidence. Pire, sa présidence impulse, sans mandat, les transformations envisagées dans la LPPR, qui soulèvent les oppositions de la communauté.

Par honnêteté envers nos collègues, nous n’avons d’autre choix que de démissionner de nos mandats, qui nous tiennent pourtant à cœur, et que nous avons assumés avec diligence et conviction.


Textes connexes


Revue de presse

Communiqué de presse

Strasbourg, le 30 juin 2020

Nous sommes sincèrement navrés de devoir en arriver à publier un démenti, mais les récentes déclarations publiques du président de notre université ne sont pas conformes aux valeurs universitaires. En qualifiant les raisons de notre démission d’« accusations mensongères », elles nous contraignent à des rectifications pour rétablir la vérité des faits.

Pour appuyer son propos, M. le Président affirme :

  1. qu’il n’y a pas de défaut de collégialité puisque « le budget 2020 a été approuvé à l’unanimité par le CA, y compris donc par certains élus démissionnaires ».
  2. qu’il n’y a pas de défaut de transparence puisque « le rapport de la Cour des comptes de 2017 n’a jamais pointé quelque opacité que ce soit ».

Or :

  1. Le procès verbal du CA du 17/12/2019 indique sans ambiguïté 11 voix contre le budget initial 2020, dépassant donc le simples nombre des élus démissionnaires. Pire, ces votes sont explicitement justifiés par les mêmes raisons qui supportent notre démission (voir extrait en fin de message).
  2. Le rapport de la Cour des comptes comporte par exemple : « sans aucun acte de publicité ni de transparence en direction des élus de l’université » ou encore « problème  de  transparence  de  la  politique  de rémunération », et conclut ainsi « En conclusion, la gestion des crédits Idex par la fondation de coopération scientifique présente un risque de « transparence » de la fondation vis-à-vis de l’université. ». Ce sont ces points déjà soulignés par la Cour qui viennent de conduire à notre démission trois ans plus tard.

Les élus démissionnaires des conseils de l’université de Strasbourg : le Conseil  d’administration (CA) et les deux commission du Conseil académique, la Commission de la recherche (CR) et la Commission de la formation et de la vie universitaire (CFVU).

Ne plus entretenir l’illusion

Membres du Conseil d’administration et du Conseil académique, nous avons tenté durant trois ans de faire vivre ces instances, d’y représenter la communauté universitaire qui nous a élus et d’œuvrer à une gouvernance transparente et à une saine gestion de l’Université. Nous faisons aujourd’hui le double constat de l’impossibilité de réaliser notre mission et du blocage des instances représentatives par la présidence de l’Université de Strasbourg.

Nous sommes en effet confrontés à une absence manifeste de transparence quant à l’utilisation des moyens budgétaires accordés à l’Université de Strasbourg. L’accès à un large ensemble de données financières nous est refusé, ce qui nous place dans l’impossibilité d’exercer correctement notre mandat. Les éléments que nous aurions souhaité pouvoir examiner concernent principalement les entités qui ont été créées ces dernières années dans le cadre des lois « LRU » et « Fioraso » : les fondations liées à l’Université de Strasbourg et les structures liées au « Programme investissements d’avenir » (PIA). À de multiples reprises, nous avons fait remarquer que les documents qui étaient fournis aux conseils ne comportaient pas, ou trop peu, d’informations et de données financières concernant les structures de types IdEx, LabEx ou EUR qui sont liées au PIA, concernant les fondations dénommées « Fondation Université de Strasbourg » et FRC (Fondation pour la Recherche en Chimie), ou encore concernant l’USIAS (Institut d’Etudes Avancées de l’Université de Strasbourg). La présidence de l’université a refusé explicitement de transmettre toute information supplémentaire au mépris des textes de loi qui confient aux conseils centraux le contrôle du budget de l’université et la définition de sa politique de formation et de recherche (Code de l’éducation, article L712).

L’ensemble des entités dont nous questionnons le fonctionnement et la gestion ont pris une importance cruciale sur la dernière décennie. Elles concentrent des moyens financiers importants, qui se chiffrent en millions d’Euros, alors que la contribution directe de l’Université aux budgets de ses facultés et ses laboratoires est fortement contrainte et, sans commune mesure, plus faible. (Par exemple, en 2019, l’Idex a financé à hauteur de 9 M€ les LabEx, de 2,7 M€ l’USIAS et de 4 M€ le levier recherche, quand le budget “recherche” de l’université est limité à 5M€). Ces moyens financiers sont concentrés sur quelques laboratoires ou équipes, loin d’une répartition qui permettrait de faire face aux difficultés rencontrées par beaucoup pour développer un enseignement et une recherche de qualité. Leur contrôle échappe pourtant aux conseils centraux. Bien que financées principalement sur des fonds publics et présentées comme des succès de l’Université de Strasbourg, ces entités sont gouvernées par des conseils ou des comités de pilotage constitués principalement par cooptation, où l’université n’est représentée que par son président ou un de ses vice-présidents. 

L’absence de transmission des informations budgétaires concernant ces structures interdit aux administrateurs et aux membres du Conseil académique d’avoir une vision complète des opérations pouvant avoir une incidence financière sur les comptes comme sur les activités d’enseignement et de recherche de l’Université de Strasbourg. Les administrateurs de l’université signataires de ce communiqué arrivent à la conclusion qu’ils sont empêchés d’effectuer leur mission et d’assumer leurs responsabilités que leur confie la loi, et tout particulièrement de juger de l’utilisation sincère et honnête des fonds publics confiés à l’université de Strasbourg. Ils ont choisi d’alerter Mme la Rectrice et Mme la Présidente de la 3e chambre de la Cour régionale des comptes en leur transmettant ce constat.

Dans cette période difficile, nous ne souhaitons plus entretenir d’illusion sur le rôle des conseils centraux dans la gouvernance de l’Université de Strasbourg. Nous sommes donc au regret de devoir présenter notre démission de nos mandats de membres du Conseil d’administration et du Conseil académique de l’Université de Strasbourg. 

La LPPR et l’Université de Strasbourg

L’Université de Strasbourg, première déconcentrée en 1970 et première refusionnée en 2009, a toujours entretenu un rapport particulier avec les réformes nationales de l’ESR. Elle fait partie de la dizaine de Grandes universités de recherche françaises. Membre non seulement de la CPU, mais surtout de la LERU et de la CURIF, elle participe aux réseaux d’influence les plus puissants de l’ESR. Son premier président fut nommé avant même la fin de son mandat à la Direction générale de la recherche et de l’innovation et son Directeur général des services est également président de l’Association des DGS d’établissements d’enseignement supérieur.

A bien des égards, l’Université de Strasbourg est un laboratoire de réformes, et ses dirigeants sont « des producteurs de solutions et de normes reprises par d’autres acteurs du système d’enseignement supérieur français ». Elle est parmi les premières à mettre en application l’autonomie de gestion prévue par la loi LRU de 2007 en passant aux responsabilités et compétences élargies. Elle a obtenu les premiers IDEX confirmés, comme les premières dérogations pour s’endetter. Elle est régulièrement citée en exemple au niveau national, notamment pour sa fondation et sa SATT, ou encore le modèle économique de l’ISIS. Encore aujourd’hui, elle expérimente avant les autres le « dialogue stratégique » qui sera étendu à tous les établissements dans le cadre de la LPPR

Concernant cette LPPR, plusieurs mesures sont déjà mises en œuvre à l’Université de Strasbourg. Citons notamment les « Chaires professeur junior », ou tenure-tracks, modèle que nous avons décidé de « promouvoir » dès 2017 (Article 3 de la LPPR et Conseil d’administration du 9 mai 2017 de l’Unistra) ; « les primes d’intéressement » (Article 14 de la LPPR et Conseil d’administration du 14 novembre 2017 de l’Unistra, voir aussi notre dossier), et qui permettent au président de notre université de doubler le salaire d’une liste tenue secrète de chercheurs jugés de « très haut niveau » ; ou encore le développement des fondations (Article 16 de la LPPR).

Conformément à ce qui est décrit dans la LPPR, l’Université de Strasbourg s’est déjà dotée de fondations puissantes et de filiales nombreuses, permettant à la fois d’échapper aux règles de la comptabilité publique (colloque « Fusions d’universités : bilan, retours d’expérience et perspectives »), et au contrôle des Conseils centraux de l’université (texte fonctionnement des conseils).

L’Université de Strasbourg et la LPPR se renforcent mutuellement et impulsent un mouvement. Participer aux conseils de l’Université de Strasbourg, approuver en local ces transformations, c’est donc participer de ce mouvement. Or, comme le prouve le récent épisode au CNESER, le fonctionnement démocratique national de l’ESR est totalement inopérant. Et comme le montrent toutes les analyses de la loi ainsi que le bilan de notre université, ce mouvement est contraire aux intérêts de l’enseignement et de la recherche, et de ceux qui les font. 

Il est donc désormais de la responsabilité de chaque élu des Conseils de l’Université de Strasbourg de légitimer ou non cette politique, au niveau local comme national. 

Lettre ouverte à M. Michel Deneken, président de l’Université de Strasbourg

Monsieur le Président,

Lors de sa séance du 25 septembre dernier, la Commission de la recherche du Conseil académique de notre université était appelée à se prononcer sur le point 7 de son ordre du jour, portant sur sa « politique de science ouverte ». Étaient inclus, en particulier, le développement de l’archive ouverte UnivOAK et l’obligation donnée aux chercheurs d’y déposer leurs nouvelles publications.

Le vote de ce point est intervenu en fin de séance : 2 membres de la Commission de la recherche se sont prononcés contre tandis que 6 d’entre eux s’abstenaient. Mme Florentz, qui animait la séance, a refusé de demander un vote explicite des personnes se prononçant en faveur de ce point. Invoquant une pratique habituelle dans l’établissement, elle a déduit un nombre de votes positifs égal à 13 voix du nombre de personnes ayant émargé la liste des présents en début de séance. Or de nombreux membres de la Commission avaient quitté la salle, sans laisser de procuration : le décompte des personnes présentes aurait dû mener au rejet de ce point.

Nous ne pouvons en conséquence que constater la nullité du vote du point 7 de la séance : le scrutin qui a été réalisé prend en compte les voix de personnes qui ne pouvaient s’exprimer et ne se sont pas exprimées, car elles étaient absentes et non représentées.

Nous voulons également, par cette lettre, protester contre ce type de pratiques dans le fonctionnement des conseils de notre université. Elles ramènent en effet le rôle des conseils centraux à celui de simples chambres d’enregistrement, en les privant de leur droit à refuser les textes qui leur sont réglementairement soumis. Elles les empêchent en outre de participer à la bonne marche de l’université en niant leur capacité d’amender et d’améliorer les points qui relèvent de leurs compétences.

Nous vous demandons solennellement de faire en sorte que le fonctionnement des conseils académique et d’administration, et en particulier les procédures de vote, reviennent à une stricte application des textes réglementaires, dans un souci de respect des principes de démocratie, de transparence et d’efficacité dans notre université.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos respectueuses salutations.

Les élus des listes Alternative 2017 au Conseil académique et au Conseil d’administration de l’Université de Strasbourg.

Congrès du 29/01/2019

Le congrès (réunion des instances décisionnaires, CA, CFVU, CR et CTE) est l’instance où sont proposées et débattues, deux fois par an, les grandes orientations de l’Université.  

Conformément à la conception de la démocratie universitaire du président Deneken, le Congrès du 29 janvier dernier s’est réduit à un lieu d’information.

Son déroulement a de nouveau mis en évidence des problèmes de fonctionnement : ont été ainsi refusées par la présidence deux demandes de mise à l’ordre du jour de points proposés par des élus, ainsi qu’une demande d’accès au verbatim des précédentes réunions.

Augmentation des frais d’inscription des étudiants étrangers

Le président de l’université a pris la décision d’une position publique individuelle. Ainsi, le Congrès n’a pas pu débattre sur le fond de cette mesure et n’a pas pu voter sur cette mesure. C’est pourtant son rôle principal, puisqu’il réunit les représentants des trois grandes fonctions de l’université : Enseignement, Recherche et Administration.

Par cette manoeuvre, le président aura donc privé l’université de se prononcer sur une mesure structurante, non seulement pour notre établissement, mais pour tout l’Enseignement supérieur et la recherche. Le président a pourtant lourdement insisté sur le fait que notre université était observée de près à l’échelle nationale. La position personnelle de notre président va donc peser sur l’orientation de notre politique d’ESR.

Comme il est indiqué dans le communiqué du président et comme les discussions l’ont explicitement confirmé en Congrès, cette position peut se résumer ainsi :

  • Il n’y a strictement aucune opposition au principe de l’augmentation des frais d’inscription pas plus qu’à une augmentation différenciée pour les étudiants étrangers.
  • L’opposition se cristallise exclusivement sur l’utilisation de ces frais d’inscription, que le ministère voudrait utiliser au financement du plan “Bienvenue en France” et non pas à l’augmentation des budgets de la présidence.
  • Le report de cette hausse est utilisé comme un simple levier de négociation.

Malgré les titres raccourcis lus dans la presse, en l’état, l’Université de Strasbourg appliquera donc bien les décisions ministérielles relatives à la hausse des frais d’inscription des étudiants étrangers.

Cette prise de position publique aura surtout pour effet de rassurer les collègues concernés par ce changement radical de modèle d’enseignement supérieur et dont la mobilisation risquait de contraindre la présidence de l’université à se conformer à nos valeurs humanistes.

Cette position questionne effectivement la politique de “premier de la classe” adoptée par notre université. Le moment où cette stratégie est en opposition frontale avec ses valeurs et intérêts concrets est arrivé. L’issue de ce conflit conditionnera ce que sera notre université, et donc ce que nous serons, “nous”.

Aujourd’hui, seule une mobilisation des directeurs de composantes et d’unités de recherche, par suspension de leur responsabilité administrative, comme à Nancy, pourra infléchir cet état de fait.

Paiement des vacations

Lors du Congrès du 21 juin 2016, nous nous étions engagés à payer les vacations dans un délais de deux mois, comme nous l’impose une circulaire. Cependant, des dysfonctionnements graves continuent d’être relevés, y compris dans la presse, comme des enseignements effectués hors de toute signature de contrat de travail.

Les tentatives de résolution par les voies normales s’étant soldées par un échec, l’établissement d’un rapport de force a été nécessaire pour obtenir une réponse.

Cette réponse indique simplement qu’il s’agit d’un problème ponctuel dans une composante particulière. En l’absence de “retour négatif” dans d’autres composantes, la présidence considère qu’il n’existe en réalité pas de problème.

Point 2. Election VP VU – Marine Stoffel (Fac de médecine – IEP)

Après nous avoir présenté son programme, Marine Stoffel, élue au CA sur la liste AFGES, a été élue Vice-Présidente Vie Universitaire de notre université. Elle est ainsi la seule VP issue d’un conseil central d’élus.

Faits marquants, elle s’est engagée à mettre en place une enquête continue de mesure des conditions d’étude. Cette étude pourra mesurer notamment l’impact de la hausse des frais d’inscription sur nos étudiants.

Elle s’est également engagée à présenter un bilan en fin de son mandat. Il a été noté que seule cette vice-présidente s’était engagée à un tel bilan.

Point 3. Projet stratégique d’établissement H2030

Le principe et les thématiques d’une grande consultation ont été soumis à l’approbation du Congrès. Il s’agit de consulter le plus grand nombre d’acteurs de notre université pour définir un projet stratégique pour 2030, notamment en vue des élections universitaires de 2020.

En réalité, le projet était déjà abouti, et il n’était pas question de l’infléchir. Ainsi, on pourra regretter l’utilisation d’une plateforme privée pour 25k€, en lieu et place de 6 mois d’ingénierie locale. On regrettera surtout que différentes suggestions, venant de tout bord, n’aient été retenues.

Notamment, il a été établi qu’il était inutile d’établir un plan stratégique dès lors que notre stratégie de “premier de la classe” nous contraignait à nous soumettre aux décisions stratégiques ministérielles. Ainsi, les stratégies d’internationalisation sont caduques, dès lors que nous devons augmenter les droits d’inscription des étudiants étrangers ou que nous répondons à un appel d’offre pour construire une université européenne (voir ci-après). La proposition d’ajouter une thématique “autonomie et stratégie locale” a été rejetée.

De plus, il a été établi que pour pouvoir réellement éclairer les décision des conseils, les propositions devaient être hiérarchisées et qu’une telle hiérarchisation ne pouvait être faite que par la communauté, par vote sur les propositions issues de la consultation. Cette proposition a également été rejetée.

En l’état, cette consultation permettra donc d’élaborer le programme électoral de l’équipe dirigeante sans pour autant pouvoir servir à infléchir sa politique pour notre université.

Point 4. Université européenne

Le Congrès a dû se prononcer sur une lettre de mission conduisant à répondre à un appel à projet pour la construction d’une Université européenne. Le document qui nous a été transmis la veille ne permet pas de comprendre l’objet d’une telle université.

Doté de 5M€ pour 3 ans et pour 8 partenaires, si le projet est retenu, il permettra donc d’obtenir en moyenne 200k€ par an et partenaire.

L’initiative n’est pas sans rappeler l’Article 11 du Traité d’Aix-la-Chapelle, qui dépasse largement les questions universitaires. Au lieu de faciliter la collaboration entre universitaires européens ayant des projets d’enseignement ou de recherche communs, l’Université de Strasbourg participe donc d’une politique venue d’en haut dont le rapport avec nos missions est difficilement identifiable.

Tous les points ont été adoptés.

Congrès 2017/2018 : Contrat quinquennal 2018-2022

Le Congrès a réuni les élus des trois conseils centraux (CA, CR et CFVU) le 2 juillet 2018. La présidence y a présenté le Contrat quinquennal 2018-2022.

Ce contrat confirme notre analyse du contrat de site 2018-2022 et y ajoute une annexe “Indicateurs et cibles de performance de l’Université de Strasbourg”. On y trouve de nombreux indicateurs sur nos missions : taux de réussite en licence, taux d’obtention des DUT, Master et doctorat, insertion professionnelle, évaluation des formations et des enseignements… Mais aussi des indicateurs politiques : endorecrutement des enseignants-chercheurs, développement de la formation continue, développement des ressources propres hors subventions pour charges de service public, taux d’occupation des locaux, ou encore évolution des surfaces immobilières.

Ces différents indicateurs ne sont pas neutres. Loin de ne proposer qu’une mesure de nos missions, ils les transforment, sans que jamais leur choix et leur pertinence n’aient été discutés et adoptés collectivement.

Un exemple : la réussite étudiante

Nous mesurons la réussite des étudiants uniquement par le taux de diplomation, sans jamais mesurer les conditions d’études ou les exigences pédagogiques. En réalité, nous prenons ainsi le décision de baisser les seconds pour améliorer le premier.

Le taux d’encadrement est ainsi passé de 22 étudiants par enseignants titulaires en 2010 à 29 en 2017, soit 30% d’augmentation… Sans jamais être mesuré puisque cet indicateur ne fait pas partie des documents stratégiques de notre université. Il pourtant facile à calculer.

La gouvernance par les nombres

Dernier mot à Alain Supiot in « La gouvernance par les nombres », Cours au Collège de France 2012-2014, Fayard, 2015 :

La raison du pouvoir n’est plus recherchée dans une instance souveraine transcendant la société, mais dans des normes inhérentes à son bon fonctionnement. Prospère sur ces bases un nouvel idéal normatif, qui vise la réalisation efficace d’objectifs mesurables plutôt que l’obéissance à des lois justes. Mais dès lors que leur sécurité n’est pas garantie par une loi s’appliquant également à tous, les hommes n’ont plus d’autre issue que de faire allégeance à plus fort qu’eux. Radicalisant l’aspiration à un pouvoir impersonnel, qui caractérisait déjà l’affirmation du règne de la loi, la gouvernance par les nombres donne ainsi paradoxalement le jour à un monde dominé par les liens d’allégeance

Congrès 2017/2018 : Lettre d’orientation budgétaire 2019

Le Congrès a réuni les élus des trois conseils centraux (CA, CR et CFVU) le 2 juillet 2018. La présidence y a présenté la Lettre d’orientation budgétaire (LOB).

Cette année, la LOB n’a pas été présentée à la Commission des finances. Le Congrès en a pris connaissance une semaine avant la séance du 26 juin et n’a pu l’amender. Elle a donc dû être adoptée sans modification possible.

Rappel de quelques éléments de contexte

  • L’augmentation du nombre d’étudiants universitaires (hors IUT) sera, pour les quatre prochaines années, d’environ 14,1 % sur la période 2015-2025, soit près de 1,5 % par an.” (p. 9)
  • la subvention pour charges de service public [sera vraisemblablement] identique à celle constatée en 2018” (p. 2)
  • l’attribution définitive des 750 M€ de la dotation non consomptible à l’IdEx Unistra pérennise le versement des intérêts de la dotation qui s’élèvent à 16,4 M€/an pour l’IdEx et 9,1 M€/an pour les LabEx.” (p.12)
  • Il faut également rappeler que l’université dégage depuis plusieurs années des bénéfices de plusieurs millions d’euros par an.

Axes stratégiques de la LOB 2018/2019

2019 s’inscrit dans la poursuite de la politique de 2018, il a été établi sans ambiguïté en séance que les deux axes stratégiques principaux de la présidence sont les suivants :

  1. Précarisation des missions d’enseignement et de recherche
    • malgré l’augmentation des effectifs étudiants, au mieux une stabilisation des effectifs d’enseignement et des dotations d’heures ;
    • pas d’augmentation notable de la dotation de fonctionnement des composantes et unités de recherche, sauf cas très exceptionnel ;
    • et poursuite du développement des financements par appel à projet, malgré le récent audit interne qui conclut que cela fait partie des plus graves problèmes de notre établissement.
  2. Développement d’une activité commerciale sans lien avec nos missions
    • La recherche de pistes nouvelles pour accroître les sources de recettes de l’établissement doit également constituer une priorité de l’établissement, en exploitant toutes les possibilités nouvelles offertes par la loi (cf. notamment : dérogation au principe de spécialité” (p.3) ;
    • la loi de finances 2018 permet en effet d’étendre le “principe de spécialité” qui limite les activités commerciales des administrations aux activités en lien avec ses missions, pour des activités de “valorisation du patrimoine immobilier” ;
    • les gains ne sont pas évalués et ne seront pas utilisés pour nos missions fondamentale.

Faisabilité et conséquences du développement d’une activité commerciale sans lien avec nos missions

Cette activité commerciale nécessite tout d’abord un investissement conséquent, notamment en terme d’immobilier pour accueillir cette activité. Ceci impose mécaniquement de limiter autant que faire se peut l’investissement dans les missions de l’université. Il faudra ensuite arbitrer l’utilisation de ces locaux, entre notre activité fondamentale et une activité rentable. Faudra-t-il déplacer des cours pour rendre les locaux disponibles à la location ? Surcharger encore nos groupes de TD faute de surface dédiée à l’enseignement ? Équiper un bâtiment pour accueillir une galerie marchande plutôt qu’un laboratoire ?

Avons-nous réellement les compétences pour développer une activité commerciale sans lien avec l’enseignement et la recherche ? Et puisque cette perspective est adoptée, pourquoi ne pas commercialiser directement ce que nous avons de plus abondant, nos formations ?

Depuis 2010, le nombre de nos étudiants a augmenté de 22%… Mais nos recettes sur droit de scolarités ont augmenté de 88%. Plus que jamais, le travail en conseil conditionne le modèle que notre université devra adopter à l’avenir.

La durée des thèses, critère de performance de la formation doctorale ?

Lors de la séance de la Commission de la Recherche (CR) du 13 juin dernier, la vice-présidente recherche et formation doctorale a présenté le nouveau mode de répartition des contrats doctoraux d’établissement entre les écoles doctorales (ED) de l’Unistra. Un critère censé évaluer la performance de la formation doctorale a été introduit pour ventiler près de 20% du nombre des contrats. Il revient à mettre en concurrence les ED par domaine en se fondant sur un indicateur qui mesure essentiellement… la durée des thèses !

Malgré plusieurs réactions (lettre ouverte, pétition, analyse, motion) en amont de la séance, alors même que les documents ont été transmis très tardivement aux élus, la CR n’a pu s’exprimer par un vote sur cette décision. Si une concertation large devrait sans doute être menée, ce n’est sûrement pas en imposant de manière autoritaire un mode de calcul discutable qu’il faut aborder la question. La décision est grave puisqu’elle diminue les financements de la recherche pour des disciplines importantes (Droit mais aussi Mathématiques, sciences de l’information et de l’ingénieur) sans aucune évaluation de la pertinence du critère employé.

Cette décision a été traduite dans le contrat quinquennal 2018-2022, sans annonce ni discussion. L’indicateur IC 5 “Réussite en doctorat” se limite strictement à la réduction de la durée des thèses, sans considération pour leur qualité scientifique, l’insertion professionnelle, ni même le taux d’abandon. Et cette durée sera calculé sans prise en compte des temps partiels, au mépris des conditions réelles de leur réalisation. Un seul objectif : augmenter à court terme le nombre de thèses soutenues et réduire aux maximum l’utilisation des locaux, au détriment de toutes les autres considérations, notamment humaines et scientifiques.

Cet épisode est parfaitement révélateur des évolutions récentes de l’ESR en général, de l’Université de Strasbourg en particulier : une prise de décision verticale sans concertation, en particulier des acteurs concernés ; un gouvernement par les chiffres, en apparence rationnel, en réalité incohérent, dont les effets sur la communauté et nos missions ne sont jamais mesurés ; le tout guidé par l’illusion selon laquelle la mise en concurrence artificielle aboutirait à une meilleure performance du système, ce qui reste à démontrer…

Pour aller plus loin :

Motion à propos du projet de loi ORE

Des élus de l’Université de Strasbourg s’inquiètent vivement des conditions de mise en œuvre du Plan étudiants proposé par le gouvernement. L’Université est obligée de travailler sur la mise en œuvre d’une réforme non encore votée par le Parlement, sans que lui soient affectés de moyens humains, matériels ou financiers, notamment pour la gestion des dossiers de candidature ou encore l’établissement de parcours spécifiques.

Ce travail se fait donc au détriment des missions premières de l’Université, dans des conditions d’urgence ne permettant pas de s’assurer de la qualité de sa réalisation.

Ces élus expriment également leur préoccupation quant aux conséquences de l’application des attendus nationaux, en particulier en raison du risque de sélection sociale qu’induisent les critères déterminés par chaque université et/ou chaque filière.

Matthieu Boileau, élu à la CR
Agnès Braud, élue à la CR
Yann Bugeaud, élu à la CR
Raphaël Eckert, élu à la CR
William Gasparini, élu à la CR
Pierre Gilliot, élu au CA
Julien Gossa, élu au CA
Corinne Grenouillet, élue à la CR
Christian Jacques, élu CFVU
Ariane Lançon, élue à la CR
Franck Macrez, élu au CA
Hélène Michel, élue au CA
Thierry Pradier, élu à la CR
Laurence Rasseneur, élue au CA
Anne Rubin, élue au CA
Jérémy Sinigaglia, élu à la CR
Christine Vespa, élue au CA
Stéphane Viville, élu à la CR
Marc Wambst, élu à la CFVU
Barbara Weisbeck, élue au CA

À qui profitera la nouvelle prime de l’Université de Strasbourg ?

Chères et chers collègues,
Les élus à la Commission de la Recherche (CR) de l’université, lors de sa séance du 18 octobre 2017, comme avant eux les représentants des personnels au Comité technique d’établissement (CTE) le 5 octobre, ont été confrontés au projet de « création d’un régime d’intéressement scientifique » à l’Université de Strasbourg. Ce dossier est à l’ordre du jour du prochain Conseil d’administration (CA), le 14 novembre. Nous vous invitons à prendre connaissance de nos analyses suivantes :

Ce dispositif permettra d’instaurer des suppléments de rémunération dans l’objectif d’attirer ou de retenir à l’Unistra quelques chercheurs jugés de très haut niveau. Ces suppléments peuvent aller jusqu’au doublement de leur salaire, et seront en partie financés directement sur les budgets de l’université. Le document ci-joint précise que la décision d’attribution sera prise par le président de l’université et tenue totalement secrète, y compris pour vos représentants élus.

Dans une période de forte tension budgétaire, alors que les effectifs ont dépassé les 50 000 étudiants à l’Université de Strasbourg, alors que le nombre d’enseignants-chercheurs y a baissé de 6% depuis 2011, il nous paraît nécessaire que s’organise un débat sur l’instauration d’un système de sur-rémunération, distribuée de manière discrétionnaire, à la demande de quelques-uns et sur le budget de tous, et qui introduit un mode de rémunération individualisé.

Nous vous invitons donc à en discuter le plus largement possible, et surtout à prendre contact avec les élus du CA avant la réunion du 14 novembre 2017 afin que votre avis soit pris en compte.

Les élus Alternative 2017 aux conseils centraux
contact@alternative2017.eu